Lecture sensorielle

   Mon Coup de cœur littéraire de l’été 2009              

 

En me promenant dans l’Isle sur la sorgue, je me suis arrêtée dans une librairie dans laquelle, je n’ai pas l’habitude de rentrer lorsque je suis dans le coin ; mais ce jour là, je ne sais plus ce qui me poussa à passer la porte…

Il y avait un étage et j’eu envie d’aller découvrir ce nouvel horizon.

Sur une grande table, où se trouvaient pleins d’ouvrages, ce petit livre attira mon regard par son titre et sa couverture : « Une gourmandise » de Muriel Barbery (auteur de l’élégance du hérisson). Trois drôles de petites bonnes femmes, bien rondes, habillées de couleurs primaires, en équilibre sur des batteurs à œufs, parcourant une route bordée de blancs d’œufs montés en neige !

Ce titre aiguisa ma curiosité et ma gourmandise.

Je ne fus pas déçue et vous allez comprendre pourquoi…

Ce livre raconte l’histoire du plus grand critique culinaire du monde, considéré comme le pape de la gastronomie, le Messie des agapes.

or, il ne lui reste que 24heures à vivre. Il le sait et n’en a cure : aux portes de la mort, il est en quête d’une saveur qui lui trotte dans le cœur, une saveur d’enfance, d’adolescence, un met original et merveilleux dont il pressent qu’il vaut bien plus que tous les festins de gourmet accompli.

Il se souvient ; vogue au gré des méandres de sa mémoire gustative, plonge dans les cocottes de son enfance, en arpente les plages et les potagers, entre parfums, odeurs etsaveurs, fragrances, fumets, gibiers, viandes, poissons etpremiers alcools…

Ca y est ? vous faites le lien ? Eh oui, cela fait appel à cette magnifique mémoire olfactive dont je vous parle si souvent !

Il m’est arrivé de saliver, de sentir , moi-même,  pendant ma lecture tous ces parfums dont il parle.

Je vous livre ici un paragraphe qui en dit déjà long :

… « j’y avais trempé mon doigt, négligemment, en passant, comme on laisse courir sa main dans l’eau fraîche au fil d’une barque, qui dérive sur l’eau….Je me sentais dans ses cuisines comme dans celle de ma grand-mère :un étranger familier introduit dans le harem. Je fus surpris de ce que je goûtai.

C’était bien une mayonnaise et, justement, cela me troublait ; brebis égarée dans le troupeau des lions, le condiment traditionnel faisait ici figure d’archaïsme saugrenu.Qu’est-ce ? « Mais c’est une mayonnaise !. Une mayonnaise comme ça, toute simple ? » j’en étais presque retourné. « Oui, toute simple : un œuf, de l’huile, du sel et du poivre. » J’insistai. « Et que va-t-elle accompagner ? ».Il me regarda avec attention. « Je vais te dire, me répondit-il lentement, je vais te dire ce qu’elle va accompagner. »

En commandant à un marmiton de lui apporter des légumes et du rôti de porc froid, il s’attela aussitôt à la tâche d’éplucher les premiers…..

On ne parviendra jamais à m’ôter de l’esprit que les crudités à la mayonnaise ont quelque chose de fondamentalement sexuel. La dureté du légume s’insinue dans l’obscurité de la crème ; il n’y a pas, comme dans bien des préparations, de chimie par laquelle chacun des deux aliments perd un peu de sa nature pour épouser celle de l’autre et, comme le pain et le beurre, devenir dans l’osmose une nouvelle et merveilleuse substance…

La description et l’émotion sensorielle la plus forte, à mon goût, se trouve à la fin du livre. Mais je ne vous en dirai pas plus, sinon, de trouver ce livre et de le lire et de déguster chaque mot et de vous laisser aller au gré de ce voyage sensoriel.

Très belle lecture !

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